La première intervention de cette séance concernant les différentes thérapies du langage pratiquées à travers le monde, était celle de Marta Paloscia (Italie).
Il s’agissait de rappeler qu’une approche cognitive était indispensable dans la mise en place de toute thérapie langagière auprès d’enfants souffrant d’anomalies organiques de l’appareil bucco facial et de dyspraxie plus ou moins prononcée.
Il est fondamental que les enfants développent des capacités métacognitives qui leur permettent une sensibilisation et un auto contrôle de leurs acquisitions langagières.
Cela mène à l’utilisation de différentes méthodes, proches de la langue des signes, associant
Le langage et les signes (exemple : le makathon en France), ou utilisant des graphismes, tout ceci de manière particulière et individualisée, en fonction des besoins réels de l’enfant.
Il faut aussi penser à avoir une approche ludique afin d’obtenir l’adhésion de l’enfant et susciter son intérêt.
Elle cite alors le cas d’un enfant de 8ans qui avait subit différentes interventions chirurgicales pour une fente sous muqueuse à l’âge de 5 ans et avait été suivi pendant un an par une orthophoniste sans véritable progrès.
Le QI de l’enfant était de 96, mais il souffrait d’hyper nasalité et d’hypotonie de la sphère oro-faciale.
Cette prise en charge a commencé à 6ans et a consisté à mettre en pratique cette nouvelle approche afin d’obtenir une bonne fonction articulatoire et une rééducation du muscle de la langue.
Le travail, partant de l’utilisation correcte des phonèmes s’est étendu progressivement à la construction de mots puis de phrases et ensuite d’histoires afin de donner du sens à ce travail, et tout en gardant un aspect ludique à ces apprentissages.
L’acquisition de phonème spécifique est par exemple associée à un geste particulier, qui a pour fonction d’aider l’enfant lorsqu’il doit reproduire ce phonème (l’acquisition devient globale et permet une prise de conscience phonologique).
L’utilisation de la lecture et de la méthode syllabique favorise également ces acquisitions.
Nous sommes persuadés, que ce soit en matière de thérapie langagière, que dans d’autres domaines, qu’il est trompeur de penser qu’il n’existe qu’une méthode unique.
Nous pensons au contraire, que l’intégration de différentes méthodes améliore les possibilités de réhabilitation fonctionnelle.
La deuxième intervention était celle de Ariela Nachmany (Israël) sur une méthode associant les sons, les formes et les couleurs, dans le traitement des troubles du langage.
Cette méthode a déjà été exposée au congrès de Strasbourg en 2006 et je vous invite à relire la transcription que j’en avais faite à l’époque.
Ensuite, nous avons eu l’intervention de Cheryl L.Lozon (USA),
Elle nous explique qu’elle est orthophoniste, qu’elle travaille depuis 15 ans dans les écoles et en libéral également.
La première fois qu’elle a été confrontée à un enfant VCFS, il était déclaré autiste avant que les parents ne lui expliquent qu’il était porteur du syndrome.
Elle s’est alors renseignée auprès des meilleurs spécialistes, à Syracuse et ailleurs afin de pratiquer la meilleure prise en charge possible.
Elle nous explique que l’orthophonie doit démarrer très tôt, bien avant la chirurgie, et que d’ailleurs, quelquefois, elle peut suffire.
Il faut travailler sur le placement des lèvres et de la langue et faire la différence entre les erreurs obligatoires dues à des défauts de structure anatomique et les erreurs compensatoires qui tendent à combler ces défauts de structure mais rendent la parole inintelligible et qu’il faut donc corriger, en particulier pour les coups de glotte.
De quoi s’agit-il, pour éviter de laisser passer l’air par le nez, l’enfant a tendance naturellement à bloquer le flux d’air au niveau du coup, ce qui l’empêche de parler correctement et d’articuler pour obtenir la différentiation des phonèmes.
Avec les tous petits, elle explique que les lèvres sont une gare, la langue le train et les dents les portes, afin de leur faire comprendre qu’il faut utiliser ces outils pour dire des sons corrects. Pour les plus grands, elle utilise les noms de chaque chose, bien entendu.
Pour les aider, au début, elle tient fermé le nez des enfants afin de leur faire travailler les sons sans qu’ils aient tendance à donner des coups de glotte, ensuite, petit à petit, il faut leur apprendre à parler sans avoir à tenir le nez bouché et sans pour autant, donner ces coups de glotte. Il faut bien sur, petit à petit, passer des phonèmes aux mots puis aux phrases.
Elle reçoit les enfants 3 à 4 fois par semaine et les parents sont invités à assister à chaque session de travail, afin qu’ils continuent les exercices, tous les jours, à la maison.
L’implication des parents est essentielle, sans eux le travail de rééducation serait beaucoup plus long.
Quatrième intervention du docteur Antonio Ysunza (Mexique)
A Strasbourg en 2006, le docteur Ysunza nous avait décrit sa méthode de thérapie du langage utilisant des supports visuels et reliant les phonèmes et les mots à des images.
Vous retrouverez son exposé du vendredi 7 juillet intitulé « phonica faces » dans les transcriptions faites à l’époque.
Aujourd’hui, il nous explique que l’application de cette méthode mise en pratique sur de nombreux enfants, avec l’implication des mères et l’utilisation de textes de lecture se rapportant à des événements actuels qui donnent du sens à cette lecture permet une amélioration relativement rapide des problèmes articulatoires des enfants SVCF avec insuffisance vélo pharyngée (entre 8 et 28 mois) pour des enfants dont l’âge variait de 3ans à 8ans.
Il rappelle d’ailleurs, que la prise en charge phonologique de ces enfants doit être antérieure à la chirurgie et aussi précoce que possible, elle doit être ludique et utiliser des lectures de textes ayant du sens.
Le débat avec la salle a donné lieu à quelques rappels et précisions.
Karen Golding-Kushner a rappelé que les meilleurs coachs en matière de thérapie langagière sont les parents.
Les orthophonistes ne doivent pas être en première ligne, ils sont là pour identifier les problèmes et donner les instructions aux enfants et à leurs parents.
Il est rappelé que le langage et l’articulation vont de paire.
Il est aussi rappelé que le fait de travailler pour éliminer les coups de glotte et améliorer l’articulation va modifier profondément les capacités de mobilité de la sphère pharyngée et au participera au bon fonctionnement du sphincter reconstruit par la chirurgie lorsqu’elle aura été pratiquée, en évitant entre autre les risques d’obstruction et d’apnée.
Ce qui a été répété, tout au long de ces exposés, c’est que la thérapie langagière doit être globale, que la simple répétition d’exercices isolés ne suffit pas, que les parents doivent être parti prenante afin de favoriser le dialogue et les échanges constructifs avec l’enfant, que tout cela doit être ludique, simple et rattaché à l’actualité de l’enfant afin qu’il y trouve du sens et adhère à ces apprentissages.
L’utilisation de signes et d’images peut faciliter ces apprentissages, surtout pour les jeunes enfants en les aidant à associer sons et images connues.
Il faut commencer cette thérapie le plus tôt possible afin de combattre l’hypotonie souvent présente et faire preuve de persévérance (plusieurs séances par semaine avec des professionnels, plus des exercices quotidiens à la maison sont absolument nécessaire pour obtenir des résultats tangibles)
Cette rééducation demande du temps, plusieurs mois, voire plusieurs années en fonction de la sévérité des troubles.
Enfin cette rééducation est préalable à la chirurgie, sachant que cette chirurgie, lorsqu’elle demeure nécessaire, viendra conforter le travail langagier fait auparavant et ne peut, en aucun cas, s’y substituer.